Olé, encore raté !

Mon oeil, le premier réveillé, fait l’appel.

Les bras ? Ils répondent. Les jambes ? Aussi. La tête ? Elle veut bien se tourner pour découvrir H à ma droite qui respire sagement dans un sommeil profond.

Un halo blanchâtre se glisse entre les lamelles de la chambre à coucher. Les milliers de lumières de la ville scintillent dans le brouillard matinal.

La Fin du Monde n’a pas eu lieu !  Comme le Professeur Calysse, les Mayas se sont gourés dans leurs calculs.

El AdvientoCe qui signifie qu’une journée à courir les magasins m’attend. Je ne suis pas mécontente, car j’avais fait le plus pénible avant la Fin du Monde : établir la liste des achats de Noël.

Une autre chose que je voulais absolument faire avant la date fatidique : voir le spectacle d’Israël Galván.

Une révélation ! Et quelle chance d’avoir pu piquer l’excellente place qu’un monsieur ronchonnant a très vite abandonnée !

Galván a le corps élancé et décharné des danseurs de flamenco qui ne semblent vivre que pour exprimer l’essentiel : les émotions.  Il part de la tradition de sa terre andalouse, du flamenco, pour le dépasser, l’enrichir, l’actualiser, afin de mieux exprimer tout ce qu’il a en lui :  » Quand je danse, je me sens fort. Le reste du temps, la vie me fait peur » (cf). Alors il danse pour nous dire que le souvenir des Gitans persécutés par les Nazis lui fait peur. D’un vieux piano en miettes qu’il ramène de la cour sur la scène (celui de Władek Szpilman ? ), il tire les cordes qui deviennent sa prison électrifiée…ou une portée de notes.  Aux sons d’une guitare exceptionnelle, Galván s’emmêle dans la barrière et ne connaît que la danse pour démêler le piège. Plus loin, il frappe de ses pieds incroyablement agiles les poteaux métalliques et durs des camps,  et parvient à leur soutirer la langue du flamenco. Vers la fin du spectacle, il gesticule dangereusement, autoritaire et crâne, autour d’un pylône, et fait du bourdon électrique son partenaire. Le son et l’homme s’affrontent dans un duo hallucinant, mais Galván dirige la danse et soumet l’ennemi.

Et des phrase en allemand sont lancées par le pianiste.

Et le chant splendide d’un compagnon d’infortune l’encourage et le console.

Et des femmes magnifiques partagent par endroit sa danse de survie. Sur les rythmes scandés par les camarades dispersés dans un désordre scénique.

Les quinze corps finissent enfermés derrière les planches des wagons de chemin de fer. Mais les âmes restent libres. Galván danse sa liberté et fait perdurer l’âme de l’Espagne dans le 3e Millénaire.

Non ce ce n’est pas la fin du monde si le flamenco ne se contente plus des robes à volants rouges. Oui c’est magnifique si le grand artiste andalou ajoute aux sons de la guitare les sons de la modernité.

Vous tous qui êtes sortis de la salle, je vous plains. C’est ça, occupez-vous plutôt de la Crise. Et soyez créatifs…

Leila« Tu sais maman, hier ce n’était pas le Fin du Monde, mais juste la fin de mon stage : mon dernier trajet Lausanne-Berne. Ouf ! « 

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